LUDWIG JUNIOR
1770-1792
1770-1792 : JEUNESSE À BONN
Les premières années
Ludwig van Beethoven est né à Bonn en Rhénanie en 1770 dans une famille modeste qui perpétue une tradition musicale depuis au moins deux générations. Nous ne connaissons pas la date exacte de sa naissance, mais seulement la date de son baptême, le 17 décembre 1770.
Johann van Beethoven emménage en 1767, après son mariage avec Maria Magdalena Keverich, dans la maison donnant sur le jardin au numéro 20 de la Bonngasse. Le père de celui-ci, dénommé aussi Ludwig van Beethoven, vit en face dans la même rue.
La famille quitta les lieux en 1774 pour s'installer au numéro 24 de la Rheingasse.
Son grand-père paternel, Ludwig van Beethoven l’ancien (1712-1773), descendait d’une famille flamande roturière originaire de Malines (la préposition van « de » dans les patronymes néerlandais n'est pas ici une particule nobiliaire, contrairement à Von « de » en allemand). Homme respecté et bon musicien, il s’était installé à Bonn en 1732 et était devenu maître de chapelle du Prince-électeur de Cologne, Clément-Auguste de Bavière. Il avait ouvert un commerce de vins pour compléter ses revenus.
Son père, Johann van Beethoven (1740-1792), est ténor dans l'orchestre de la cour de l’Électeur. Il élève ses enfants dans la plus grande rigueur. Les biographes de Ludwig van Beethoven parlent de la brutalité et de l'alcoolisme de son père, mais on ne sait exactement si cette mention est conforme à la réalité. Sa mère, Maria-Magdalena van Beethoven, née Keverich (1746-1787), est la fille d’un cuisinier de l’Archevêque-Électeur de Trèves. Ce poste de cuisinier était un poste d'employé de cour de haut niveau. Dépeinte comme effacée, douce et dépressive, elle est aimée de ses enfants. Ludwig est le deuxième de sept enfants, dont trois seulement atteignent l’âge adulte : lui-même, Kaspar-Karl (1774-1815) et Johann (1776-1848). Il ne faut pas longtemps à Johann van Beethoven pour détecter le don musical de son fils et réaliser le parti exceptionnel qu’il peut en tirer. Songeant à l’enfant Wolfgang Amadeus Mozart, exhibé en concert à travers toute l’Europe une quinzaine d’années plus tôt, il entreprend dès 1775 l’éducation musicale de Ludwig et, devant ses exceptionnelles dispositions, tente en 1778 de le présenter au piano à travers la Rhénanie, de Bonn à Cologne. Mais là où Leopold Mozart avait su faire preuve d’une subtile pédagogie auprès de son fils, Johann van Beethoven ne semble capable que d’autoritarisme et de brutalité et cette expérience demeure infructueuse, à l’exception d’une tournée aux Pays-Bas en 1781.
Le jeune Ludwig parfait son éducation générale auprès de la famille von Breuning, chez qui il passe désormais presque toutes ses journées, donnant des cours de musique à certains des enfants von Breuning. Il a fait la connaissance de cette famille grâce à son amitié avec le médecin Franz-Gerhard Wegeler qui l'introduisit auprès des von Breuning et auquel il fut attaché toute sa vie. Il devient également l’élève de Christian Gottlob Neefe (piano, orgue, composition) qui lui transmet le goût de la polyphonie en lui faisant découvrir Le Clavier bien tempéré de Bach. Il compose pour le piano, entre 1782 et 1783, les 9 variations sur une marche de Dressler et les trois Sonatines dites « à l’Électeur » qui marquent symboliquement le début de sa production musicale. Ce prince électeur est Maximilien François d'Autriche depuis 1784. Il est donc le nouveau « patron » de Beethoven qui faisait déjà partie de la vie musicale de la cour comme aide organiste et « cimbalist », c'est-à-dire répétiteur pour les chanteurs.
Enfant, son teint basané lui vaut le surnom de « l'Espagnol » : cette mélanodermie fait suspecter une hémochromatose à l'origine de sa cirrhose chronique qui se développera à partir de 1821 et sera la cause de sa mort.
Le mécénat de Waldstein et la rencontre de Haydn
Devenu organiste adjoint à la Cour du nouvel Électeur Max Franz, qui devient son protecteur (1784), Beethoven est remarqué par le comte Ferdinand von Waldstein dont le rôle s’avère déterminant pour le jeune musicien. Il emmène Beethoven une première fois à Vienne en avril 1787, mais la rencontre projetée avec Mozart n'eut pas lieu, Beethoven étant retourné à Bonn en toute hâte en juillet 1787 pour revoir sa mère mourante.
En juillet 1792, Waldstein présente le jeune Ludwig à Joseph Haydn qui, revenant d’une tournée en Angleterre, s’était arrêté à Bonn. Impressionné par l'écoute d’une cantate composée par Beethoven (celle sur la mort de Joseph II ou celle sur l’avènement de Léopold II) et tout en étant lucide sur les carences de son instruction, Haydn l’invite à faire des études suivies à Vienne sous sa direction. Conscient de l’opportunité que représente, à Vienne, l’enseignement d’un musicien du renom de Haydn, et quasiment privé de ses attaches familiales à Bonn (sa mère est morte de la tuberculose en juillet 1787 et son père, qui fut mis à la retraite dès 1789 car il avait perdu sa voix, est devenu incapable d’assurer la subsistance de sa famille), Beethoven accepte. Le 2 novembre 1792 il quitte les rives du Rhin pour ne jamais y revenir. La question du retour à Bonn ne faisait pour lui aucun doute, mais la Révolution en décida autrement. Le jeune musicien emportait avec lui cette recommandation de Waldstein : « Cher Beethoven, vous allez à Vienne pour réaliser un souhait depuis longtemps exprimé : le génie de Mozart est encore en deuil et pleure la mort de son disciple. En l’inépuisable Haydn, il trouve un refuge, mais non une occupation ; par lui, il désire encore s’unir à quelqu’un. Par une application incessante, recevez des mains de Haydn l’esprit de Mozart. »