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L'OEUVRE

Tchaïkovsky avait composé  La Dame de Pique durant un séjour à Florence, en 44 jours, du 31 janvier au 15 mars 1890. 

Le sextuor à cordes op. 70  "Souvenir de Florence" fut composé  en juin et juillet 1890 et révisé de décembre 1891 à janvier 1892.

Il fut joué pour la première fois le 6 décembre 1892 à Saint-Pétersbourg (la version de 1891-1892).

 

  1. Allegro con spirito

  2. Adagio cantabile e con moto

  3. Allegretto moderato

  4. Allegro vivace

 

 

 

Circonstances d'écriture
 

Tchaïkovsky dédicaça le sextuor à la Société de Musique de chambre de Saint-Pétersbourg qui venait de le nommer Membre d'Honneur. Le titre provient de l'un des thèmes principaux, composé durant ce séjour à Florence du début de l'année 1890 au cours duquel il composa aussi La Dame de Pique.

 

 

 

 

Tchaikovsky, fasciné par l'Italie, dédie son Souvenir de Florence à la femme qui soutint le compositeur durant plus de douze ans, la Baronne Nadejda Florovskaïa von Meck, riche veuve qui lui apporte son admiration et son soutien financier sans jamais vouloir le rencontrer. Dès 1876, elle met ses nombreuses propriétés à la disposition de Tchaïkovsky pour des séjours à travers toute l'Europe.  C'est à Florence en 1890, un soir à l'opéra, que leurs regards se croisent, furtivement, par accident… Madame von Meck fait comme si elle ne le connaissait pas. C'est pourtant toute leur intimité épistolaire et musicale  que la troupe du Centre dévoile au gré de mélodies de Tchaïkovsky, de romances, de lettres et de souvenirs de lieux chers...

 

Parmi les offres de séjour, ce séjour à Florence justement, où Tchaïkovsky compose son opéra La Dame de Pique entre janvier et mars 1890 à partir de la nouvelle de Pouchkine. Un soir, lors d'une représentation à l'Opéra de Florence, malgré le protocole des précautions prises pour éviter toute rencontre, les regards du compositeur et de Madame von Meck se croisent furtivement avant le levé de rideau. Est-ce de ce souvenir inoubliable entre tous que le sextuor se fait l'écho, comme un hommage du musicien reconnaissant à cette mystérieuse figure féminine à peine entrevue mais qui l'accompagne depuis tant d'années ?

Madame von Meck à Tchaïkovsky (1878)

"Ma villa est entourée de terrasses et de jardins peuplés de statues antiques. L'archange Saint-Michel monte la garde au-dessus d'une fontaine réduite au silence… Plus loin, sous l'argent des oliviers et des bosquets superbes, empourprés par novembre, s'étend Florence ; à l'horizon, se profilent les sombres Appenins... Venez, ami bien cher : je vous aménagerai quelque retraite, en ville ou bien sur les collines…"  

Tchaïkovski à Madame von Meck

Florence, 16/28 février 1878

"Quelle ville ravissante que Florence ! Plus on vit, plus on l'aime. Ce n'est pas une capitale bruyante, dans laquelle le regard se disperse et où l'on est fatigué par le bruit., Mais en même temps il y a tant de choses qui offrent un intérêt artistique et historique, qu'il n'y a aucun moyen de s'ennuyer. Nous visitons tout ce qu'il y a à voir dans la ville, sans nous hâter, sans courir d'un musée à l'autre, ou d'une église à une galerie. Tous les matins nous allons voir quelque chose, puis vers 11 heures nous rentrons à la maison. De 11 heures à 1h je travaille, c'est-à-dire que j'écris de petites pièces pour piano ou une romance. Après le déjeuner nous allons à Uffizi, à Pitti, ou à l'Académie. De là, nous allons à pied à Cascino, qui devient de plus en plus ravissant chaque jour, du fait de l'arrivée progressive du printemps. C'est le dîner, je m'en vais dans les grandes rues, pleines de vie et d'animation. Le reste du soir, je le passe à lire ou à écrire des lettres.

Il n'y a pas du tout de musique ici. Les deux théâtres d'opéra sont fermés, et c'est une grave privation pour moi. Parfois j'ai tellement envie d'entendre de la musique, que même un Trouvère ou une Traviata me rendraient heureux. Mais on ne peut même pas entendre ça. De tout ce que j'ai vu c'est sans doute la chapelle des Medici à San Lorenzo qui a produit sur moi la plus forte impression. C'est d'une beauté et d'une grandeur colossales. C'est là que j'ai commencé à comprendre pour la première fois toute l'immensité du génie de Michel-Ange. Je commence à lui trouver une parenté indéfinissable avec Beethoven. La même envergure, la même puissance, qui confine parfois ou disgracieux, la même humeur sombre. Chez Taine, j'avais lu une comparaison très subtile de Raphaël avec Mozart. Je ne sais si quelqu'un a déjà comparé Michel-Ange avec Beethoven. [...]"

1890, année de la création de Souvenir de Florence, est aussi pour Tchaïkovsky l'époque de la rupture. Cette relation platonique avec une égérie à la fois invisible et généreuse prend fin en 1890, un mois et demi après la composition du sextuor, à la suite sans doute des rumeurs qui courent sur les penchants homosexuels du compositeur. "Leurs relations avaient brusquement pris fin le 17 octobre, après une lettre très sèche de Nadejda Philaretovna avisant le compositeur que, se trouvant elle-même dans une passe difficile, menacée par la tuberculose, elle ne pouvait plus lui servir de pension ; elle lui faisait entendre, en outre, que la rupture était totale et définitive. De l'avis des proches du musicien, c'était le violoniste Pakhoulski qui avait dicté cette décision à Madame von Meck en la mettant au courant des moeurs de Tchaïkovski" (Hofmann, Tchaïkovski, Le Seuil, 1959, p.139). 

 

Hélas, ce Souvenir de Florence, achevé deux mois à peine avant la rupture voulue par Madame Von Meck, ne sera peut-être jamais écouté par elle...

 

Tchaïkovsky ne s'en remettra jamais. On dit qu'il ira jusqu'à appeler et maudire Nadejda Von Meck sur son lit de mort, trois ans après la rupture. Madame von Meck décèdera en janvier 1894, moins de trois mois après Tchaïkovsky. Apprenant la mort du compositeur, elle en fut, dit-on, bouleversée. 

 

- Tchaikovsky - Casse-Noisette, Op.71 (1892) - Trepak (Danse Russe - Bolchoï / Bolshoi). 

Cette forme du Trepak est également utilisée dans le Souvenir de Florence., dont la composition est pratiquement contemporaine à celle de Casse-Noisette.

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