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schwammerl - le champignon

En tous points petit... 

 

Taille autour d'1m55. Visage épais. Ses amis le surnomment  affectueusement "Le Champignon" ("Schawammerl") Si myope qu'il dormait, dit-on, avec ses lunettes. Il est totalement complexé par son physique. Socialement, il ne fait pas partie des grands de ce monde. Fils d'un instituteur et d'une domestique (cuisinière), 12ème de 14 enfants, et orphelin de mère à 15 ans, il n'a d'autre appui que sa précocité musicale tôt détectée par son entourage.

 

Malheureux en amour
Il tombe amoureux à 17 ans de Thérèse Grob 16 ans, fille d'une lingère voisine et dotée d'une jolie voix de soprano, L'amour est réciproque mais une loi sur le mariage promulguée par Metternich interdit formellement le mariage aux jeunes hommes qui ne sont pas en état de subvenir aux besoins de leur famille. Schubert tente en avril 1816 d'obtenir un poste de maître de musique mais sa demande est rejetée. Thérèse Grob épousera en novembre 1820  Johann Bergmann, un boulanger -pâtissier du même âge que Schubert, mais plus fortuné que lui.

Schubert trouvera un petit travail ingrat d'aide-instituteur dans l'école de son père...


Il s'éprend aussi, autour de 1820, de la comtesse Caroline Esterhazy son élève. Celle-ci ne le voit pas autrement qu'en petit et trop modeste maître de musique. Il contracte sans doute la syphilis avec la femme de chambre de la comtesse, Pepi Pöcklhofer, ou peut-être au contact d'autres fréquentations de cafés.
 

La guigne

Beaucoup de malchances cumulées : taille, physique, pauvreté, obscurité, rebuffades. Goethe ne répond pas à son envoi du Roi des Aulnes. Seulement 1/10 de son catalogue riche d'un millier d'œuvres (dont 600 lieder) sera publié de son vivant. La syphilis se déclare à partir de 1823, douloureuse, mal soignée, humiliante, invalidante physiquement et socialement (une douleur osseuse dans le bras gauche l'empêche de jouer du piano), mortelle. Il est hospitalisé, suit des traitements peu efficaces, perd ses cheveux, sombre dans la neurasthénie, tout en composant avec acharnement les chefs d'oeuvre de ses dernières années, dans une sorte de course contre la montre. Il meurt le 19 novembre 1828 à 31 ans, emporté par une fièvre typhoïde qui est peut-être liée aux ravages de ce mal. 

 

Il n'aura donné -à ses frais- qu'un seul concert, le 26 mars 1828, et ce concert passera totalement inaperçu car il coïncide malheureusement avec la venue de Paganini à Vienne... Beethoven, son modèle et son dieu, l'ignore jusqu'à la veille de sa mort (il aurait tout de même reconnu le génie de Schubert en 1827, année de sa mort, à la lecture de quelques partitions), et on n'est pas sûr que Schubert ait pu le rencontrer. La Symphonie inachevée attendra 1865 pour sortir du  tiroir du musicien de la Société de Musique de Gratz, à qui il l'avait timidement envoyée. On ne trouve l'annonce de son décès dans aucun journal de la capitale. Il meurt en laissant une "fortune" de 63 Gulden (moins de 50 € )

 Lettre à Kupelwieser, 31 mars 1824

 

"Je me sens le plus malheureux, le plus misérable des êtres. Imagine un homme dont la santé ne sera plus jamais bonne et qui, par pur désespoir de cela, rend les choses pires au lieu de les améliorer ; imagine un homme, dis-je, dont les plus brillants espoirs ont péri, auquel l'amour et l'amitié n'ont à offrir au mieux que souffrance, dont l'enthousiasme (au moins celui qu'on peut stimuler) pour tout ce qui est beau menace de l'abandonner et, je te le demande,  n'est-ce pas un être misérable, malheureux ? 'Mon repos a fui, mon cœur est lourd ; je ne le retrouverai plus, jamais, jamais plus', je pourrais chanter cela tous les jours maintenant, car chaque soir, au moment de me mettre au lit, j'espère ne pas me réveiller et chaque matin ne fait que ranimer la douleur de la veille."

"Mes œuvres sont les enfants de ma connaissance de la musique et de ma douleur"

Schubert. Carnets, 1824

Douleur physique de la mort à l'oeuvre et douleur morale de l'exil intérieur, alors que sa vie terrestre lui semble si éloignée parfois de la "vraie vie"...

 

Douleur et amour. Schubert fait sien dans un lied le poème À la musique de Schubart, l'auteur du poème de La Truite

 

"Ô toi art pur, dans bien des heures sombres, où la violence de la vie m’étouffe, tu as enflammé mon cœur d’un grand amour, tu m’as emporté dans un monde meilleur. Souvent un sourire, issu de ta harpe, un accord doux et saint venant de toi, m’a ouvert le ciel de temps meilleurs, ô toi art pur je t’en remercie" 

En témoigne déjà le lied "Der Wanderer", poème d'exil, lourd de la nostalgie du vrai pays, composé en 1816 alors qu'il n'a pas vingt ans. Une question revient, lancinante, la question du lieu :  "Ce pays qui parle ma langue, ô pays, où es-tu ? "

Schubert, Der Wanderer, D 493, interprété par Fischer Dieskau

sur un poème de Georg Philipp Schmidt von Lübeck, 1766-1849

 

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