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QUITTER SALZBOURG

Mais la seule chose qui me dégoûte à Salzbourg, je vous le dis comme je l'ai sur le cœur, c'est que les relations avec les gens n'ont aucun niveau, que la musique ne jouit que d'une piètre considération, et que l'archevêque ne croit pas sensés les gens qui ont voyagé. Mais je vous assure qu'on est vraiment une pauvre créature si on ne voyage pas, tout au moins en ce qui concerne ceux qui se consacrent aux arts et aux sciences. Un homme de talent moyen restera toujours médiocre, qu'il voyage ou non, mais un homme de talent supérieur, -ce que, sans renier Dieu, je ne puis me dénier-, deviendra mauvais s'il reste toujours au même endroit.

Mozart à son père, Paris, 11 septembre 1778

 

L'archevêque ne me payera jamais assez pour l'esclavage à Salzbourg.

Mozart à son père, Paris, 12 novembre 1778

 

Je ne veux plus rien entendre de Salzbourg. Je hais l'archevêque jusqu'à la frénésie.

Mozart à son père, Vienne, 9 mai 1781

 

 [Au sujet de Salzbourg] : Je ne savais pas que j'étais un valet.  C'est ce qui m'a cassé le cou.  J'aurais dû gaspiller tous les matins quelques heures dans l'antichambre. On m'a certes dit plusieurs fois de me montrer, mais je ne pouvais nullement me rappeler que cela fît partie de mon service. Et je ne venais en temps et en heure que lorsque l'archevêque me faisait appeler.

Mozart à son père, Vienne, 12 mai 1781

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Après le coup de pied du comte d'Arco, chambellan de Colloredo, le 8 juin 1781 (seule réponse à la lettre de démission de Mozart)

Le coeur ennoblit l'homme; et si je ne suis pas un comte, j'ai peut-être plus d'honneur dans l'âme que bien des comtes ; et valet ou comte, du moment qu'il m'outrage, c'est une canaille. - Je commencerai par lui représenter, très raisonnablement, combien il a mal et très vilainement agi dans son affaire...; mais, pour conclure, il faut pourtant bien que je l'assure par écrit qu'il ne doit attendre de moi qu'un coup de pied au cul et une paire de gifles.

Lettre à son père, Vienne, 20 juin 1781

« Mag er geh'n, ich brauch' ihn nicht ! » (« Qu'il parte, je n'ai pas besoin de lui ! »)

 

En 1776, Mozart qui a alors vingt ans, décide de quitter Salzbourg. Mais le prince-archevêque refuse de laisser partir son père, et lui impose de démissionner de son poste de maître de concert. Après une année de préparatifs, il part avec sa mère, tout d'abord à Munich, où il n'obtient pas de poste, puis à Augsbourg, et enfin à Mannheim, où il se lie d'amitié avec de nombreux musiciens. Toutefois, ses démarches pour obtenir un poste restent, là aussi, infructueuses. C'est à Mannheim également qu'il tombe éperdument amoureux de la cantatrice Aloysia Weber, ce qui suscite la colère de son père, qui lui demande de ne pas oublier sa carrière. Couvert de dettes, Mozart comprend qu'il doit reprendre ses recherches, et part pour Paris, au mois de mars 1778.

 

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À Paris, Mozart espère trouver de l'aide auprès de Melchior Grimm, qui s'était occupé de sa tournée lorsqu'il avait sept ans, mais sans succès, pour des raisons données par l'homme de lettres, un manque de savoir-faire pour se mettre en valeur. Grimm met fin, déçu, au séjour de son jeune protégé. Mozart ne trouve pas non plus de poste qui lui convienne, et a même du mal à se faire payer ses leçons d'un noble qui le traite avec condescendance, comportement des nobles en général qui marquera Mozart. Lors de ce séjour, sa mère Anna Maria tombe malade et meurt le 3 juillet 1778 rue du Gros-Chenet (actuellement au 8 rue du Sentier où se trouve une plaque commémorative) à Paris. Elle est inhumée sur place après une messe à l'église Saint-Eustache en présence de son fils qui signe sur le registre paroissial de cette église.

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Mozart rentre alors à Salzbourg, où son père réussit à convaincre le prince-archevêque de le reprendre à son service. Sur le trajet de son retour, il passe par Munich, où vit la famille Weber. Mais Mozart apprend qu'Aloysia aime un autre homme. Après tous ces malheureux événements, il arrive, déprimé, à Salzbourg le 29 janvier 1779, où il retrouve son ancien poste de Konzertmeister auquel Colloredo ajoute la fonction d'organiste de la Cour pour 450 florins par an.

 

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En novembre 1780, il reçoit une commande pour l'opéra de Munich, et il part donc, comme son contrat l'y autorise. La création, le 29 janvier 1781, de Idomeneo, Rè di Creta (Idoménée, roi de Crète), opera seria, est accueillie très favorablement par le public. De retour à Salzbourg, Mozart doit suivre son employeur à Vienne, où le prince-archevêque le traite publiquement, après des remarques du jeune musicien jugées impertinentes, de « voyou » et de « crétin » avant de le congédier le 9 mai 1781 avec ces mots : « Mag er geh'n, ich brauch' ihn nicht ! » (« Qu'il parte, je n'ai pas besoin de lui ! »). Mozart s'installe alors dans la capitale autrichienne, dans la pension de madame Weber, comme compositeur indépendant.

La mort d'Anna-Maria à Paris, 3 juillet 1778

 

Juillet 1778. Dans sa petite chambre mansardée, malgré la chaleur de cette belle journée, Anna-Maria Pertl a froid. Elle va mourir, oh, elle le sent… ici en France.

Elle ne reverra plus son Autriche natale où elle est née en 1720. Jamais.

Pourtant, tout allait bien, encore, il y a quelques jours. Elle accompagnait son fils Wolfgang, comme d'habitude, dans ses tournées européennes. Et se retrouve en 1778 avec lui à Paris pour l’une d’elles.

Mais des fièvres la prennent. Violentes. Et mortelles. Elle pousse son dernier soupir dans le petit hôtel du 8 rue du Sentier (rue du Gros-Chenet à l’époque).

Triste, si triste moment... On lit dans Biographie universelle des musiciens et bibliographie générale de la musique, vol. 6, que seuls Wolfgang et deux personnes assistent aux derniers moments d’Anna et à son enterrement : l’hôtesse desQuatre-Fils-Aymon où ils logeaient et un ami allemand...

Le registre de la paroisse de Saint-Eustache dit :

« Ledit jour, Anne-Marie Perlt, âgée de 58 ans, femme de Léopold Mozart, maître de chapelle de Salzbourg en Bavière, décédée hier rue du Gros-Chenet, a été inhumée au cimetière en présence de Wolfgang Amadi Mozart, son fils, et de François Haina, trompette de chevau-légers de la garde du roi. »

La tombe d’Anna dans le petit cimetière attenant à Saint-Eustache n’existe plus, mais une plaque commémorative a été apposée en 1953.

Michaël Haydn (1737-1806)

Le frère cadet de Joseph Haydn, Michaël Haydn, reçoit comme son frère une éducation musicale dans la maîtrise de la cathédrale Saint-Étienne de Vienne, dirigée par Georg Reutter. Il étudie également le violon et l’orgue. Il complète ensuite son éducation au séminaire jésuite.

Après avoir occupé divers emplois de maître de chapelle, il finit par être nommé, en 1763maître de concert (« Konzertmeister », c'est-à-dire premier violon, également chargé de diriger l'orchestre) et compositeur à la cour de Colloredo, prince-archevêque de Salzbourg. En 1777, il devient organiste de la cathédrale de Salzbourg et aura notamment pour élèves Carl Maria von Weber et Anton Diabelli.

Le 17 août 1768, il épouse la chanteuse Maria Magdalena Lipp (1745–1827) avec qui il eut une fille, Aloisia Josefa, morte en bas âge.

Maria Magdalena tint le rôle de la Miséricorde dans la cantate Die Schuldigkeit des ersten Gebotes, puis celui de Tamiridans Il re pastore, deux œuvres de jeunesse de Wolfgang Amadeus Mozart. En effet, grand admirateur des frères Haydn, ses aînés de vingt ans, Mozart a beaucoup étudié leurs compositions et s'en est inspiré à maintes reprises. Mozart a demandé à son père, qui jalousait Michael Haydn, de lui envoyer les nouvelles compositions de son collègue de Salzbourg, spécialement tout ce qui relevait du contrepoint et de l'orgue.

À sa mort, l'Archevêque de Salzbourg fit des obsèques solennelles au cadet des Haydn.

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Le Requiem de Michaël Haydn

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L'oeuvre de Michaël Haydn comporte plus de huit cents compositions, essentiellement religieuses. Dans ce total distinguons les 150 compositions instrumentales, dont 41 symphonies. C’était un homme timide et réservé qui fuyait les éloges du public, ce qui explique en partie pourquoi il a pu tomber dans un relatif oubli. Cependant, ses contemporains parlaient de lui comme d’un artiste qui, particulièrement pour la musique sacrée, pouvait être situé au tout premier rang.

On relèvera notamment son superbe et solennel Requiem de 1771 chanté avec orchestre à Salzbourg, tandis que parmi le public se trouvaient Mozart père et fils. Il est indubitable que le Requiem de Mozart, composé en 1791, s'inspire par sa texture orchestrale, ses harmonies, ses équilibres architecturaux, aussi bien du Requiem de Michael Haydn créé vingt ans plus tôt que de celui d'Antonio Rosetti (daté de 1776).

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Michaël vu par Leopold

 

Qui, crois-tu, est devenu organiste à la Trinité ? Monsieur Haydn. Tout le monde rit ! C'est un organiste bien cher. Après chaque litanie il siffle un quart de vin ; aux autres services il envoie Lipp à sa place et celui-ci boit aussi comme un trou.

Léopold à son fils, Salzbourg, 29 décembre 1777

Le Mozart de Bologne

Portrait appelé le « Mozart de Bologne », peint en 1777 à Salzbourg par un inconnu, pour le père Martini, qui l'avait commandé pour sa galerie de portraits de compositeurs. Léopold Mozart écrira à propos du portrait, dans une lettre adressée au père Martini, datée du 22 décembre 1777 : « C'est une œuvre d'art de valeur médiocre, mais je peux vous assurer que du point de vue de la ressemblance, elle est parfaite. »

Bryn Terfel - Le Nozze di Figaro - Se vuol ballare signor Contino, la réponse de Mozart aux bottes du comte d'Arco ? (Metropolitan Opera, 1998. Conductor : James Levine)

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