l'Octuor de Mendelssohn
1ère page du manuscrit de 1825, de la main de F. M. (Bibliothèque du Congrès, Washington. Les 88 pages sont numérisées et accessibles en ligne (voir Sources)
Né à Hambourg, Félix Mendelssohn avait 16 ans lorsqu'il a composé en 1825 dans la demeure familiale de Berlin l'Octuor en mi bémol majeur pour un ensemble de huit instruments à cordes. La première interprétation publique eut lieu onze ans plus tard, en 1836 à Leipzig. Cet octuor est composé de façon classique en quatre mouvements : Allegro moderato, Andante, Scherzo, Presto finale.
Mendelssohn a écrit l'Octuor pour le 23ème anniversaire de son professeur de violon, Eduard Rietz, pour qui il avait déjà écrit un concerto et une sonate. C'est Rietz qui tiendra la partie de premier violon solo dans le concert de résurrection de la Passion selon Saint Matthieu en 1829 à Berlin. A cette époque, il découvre l'opéra romantique allemand : il a assisté avec ravissement à la première de Der Freischütz de Carl-Maria von Weber (1786-1826) en juin 1821 à Berlin dans la nouvelle salle du Konzerthaus.
Dans l'Octuor, l'écriture de Mendelssohn pour le premier violon dans un cadre de musique de chambre élève le violon de Rietz au premier rang - un rôle approprié, lorsque l'enseignant, l'élève et d'autres musiciens ont donné la première lors de l'un des concerts familiaux du dimanche à midi, moment très attendu dans le calendrier musical de Berlin.
Le concept de la pièce est révolutionnaire. Mendelssohn utilise une vaste palette de couleurs instrumentales, allant de l'unisson monochrome feutré à la fin du Scherzo à l'éclatement de teintes multicolores dans l'exubérante fugue en huit parties qui suit.
À la fin de 1825, Mendelssohn quitta la maison d'été de Leipzigerstrasse 3 de Berlin pour s'installer dans une pièce en mezzanine dans l'aile gauche de la maison principale. Mais il devait retourner au Gartenhaus avec ce que son neveu Sebastian Hensel appelait «la solitude profonde d'une forêt», à quelques pas de la ville animée de Berlin, l'été suivant. Puis, en l'espace d'un mois, du 7 juillet 1826 au 6 août, son imagination - suivie de beaucoup de retouches sous la direction de son professeur de composition Adolph Marx - a conçu une autre composition parfaitement formée, l'ouverture du Songe d'une nuit d'été. Faut-il voir dans cette féerie shakespearienne l'hommage du jeune compositeur à Weber, mort brutalement en juin 1826 après les premières représentations de son opéra Obéron au Covent Garden de Londres ? Ce "ruissellement de jeunesse" selon la formule de Schumann suit l'exemple de l'Octuor en explorant les frontières entre la musique absolue et la musique de programme. Mendelssohn n'a jamais apporté la même spontanéité, la même certitude du toucher et la vivacité de l'imagination à une composition comme il l'avait fait dans son adolescence et à la musique du Songe, libre d'explorer son monde privé dans la solitude du Gartenhaus... Dans les anciens terrains de chasse de Frédéric le Grand qui constituent aujourd'hui le site du Bundesrat allemand actuel ou Conseil fédéral.